Texte en Proverbes inventés



Les proverbes et expressions toutes faites sont l’un des fondements de la culture et de la croyance populaire. Inventer des proverbes produit un vacillement de la pensée. Construire un texte mêlant des proverbes non transformés et des proverbes inventés ou issu du répertoire habituel et transformés ou non produit un texte parfois déjanté, parfois subversif qui questionne les catégories de la pensée.

Poésie | Martine Estrade | Literary Garden

Liste de proverbes inventés

Qui veut voyager loin laissera le temps au temps

La nostalgie c’est boire du vin pour oublier le goût de l’alcool de riz

Mariage pluvieux incite à le consommer vite

Il faut savoir perdre pour vivre et non pas vivre pour ne rien perdre

La Sagesse c’est Sourire à la vie d’un des mille sourires chinois.

Vivre de vacillements et d’odeurs de jasmin.

Sourire à qui sourit.

Honni soit qui rien ne pense.

Plaisir d’amour ne dure que le temps où l’on rêve, chagrin d’amour se passe du monde des songes.

Il ne faut pas dire : fontaine, je ne boirai pas de ton eau

Petit à petit , dragon fait son nid.

Qui est sain d’esprit vivra dans une grande ville.


Historiette

Bangkok. Fête boudhique des lumières. offrandes de fleur d’encens et de bougies sur la Chao Praya. Vorasingh Chan se promène en pirogue sur la rivière. Vorasingh c’est un prénom Thai et Chan , un nom chinois , Teochew, plus précisément. Ce qu’il ne parvient pas à oublier. Oublier Suzhou ! La ville des canaux.. Oublier le village est plus facile. Qui est sain d’esprit vivra dans une grande ville a dit l’ecclesiaste.

Bangkok, les canaux, des klongs nauséabonds. Niveau de pollution 4. eau non recyclable. A la surface, autour des détritus alimentaires des milliers de poissons-chats noirs et mous, énormes à la bouche gigantesque, une marée de viande. L’habit animal ne fait pas la denrée d’ailleurs les Thai les consomment. Il ne faut pas dire fontaine je ne boirai pas de ton eau.

Li Chan a quitté la Chine : trois jours de voyage et trois bus pour gagner Bangkok. Qui veut voyager loin laissera le temps au temps. Arrivé chez des cousins Teochew dans la Chinatown près de la rivière, il s’est prénommé Vorasingh. Un des premiers noms Thai qu’il ait croisé, une nouvelle naissance. Oublié Li, mais pas les canaux de la rivière Suzhou. La nostalgie, pour Vorasingh c’est boire la bière Thaï Singha pour oublier le goût de l’alcool de riz. Mais il ne regrette pas. il faut savoir perdre pour vivre et non vivre pour ne rien perdre. A Suzhou, sa vie se serait déroulée répétitive jusqu’au vertige de l’identique dans la fabrique de parapluie du village. Honni soit qui rien ne pense ! Qui est sain d’esprit vivra dans une grande ville dit toujours l’Ecclesiaste.

Li devait se marier. Le jour du mariage, il pleuvait .Un mariage en chinois ça s’écrit « apparier portes et fenêtres », tout sauf le rêve. Rêve qui roule n’amasse pas de bien. Li rêvait Bangkok : vivre de vacillements et d’odeur de jasmin. Mariage pluvieux incite à le consommer vite et Huelan était jolie mais Li a pris le bus avant la cérémonie. Plaisir d’amour ne dure que le temps du rêve, chagrin d’amour se passe du monde des songes. Li a joué de courage.

Coule la Chao Praya, filent les jours. D’un fleuve, l’autre.

La sagesse de Vorasingh c’est sourire à la vie d’un des innombrables sourires chinois. Petit à petit, dragon fait son nid.

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