L’écharpe jaune : le détail révélateur



Voyage | Martine Estrade | Literary Garden

Tu portais ce jour là, au café Le Flore en l’Ile, une écharpe de laine jaune. Jaune, comme les tissus des Bouddhas de Bangkok ou les étoles des bonzes qui, sur la Chao Praya, parcourent en ferrys la Cité des Anges.

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Je revenais de Bangkok depuis quelques dizaines d’heures. Bangkok, où ne vivre que vacillements et odeurs de jasmin.

Ton écharpe jaune se détachait, étrange, sur un costume gris terne. Gris, comme un ciel de Paris. J’étais descendue de trente degrés.

Le jaune de ton écharpe, c’était la couleur de ma peau après le massage aux herbes safranées du monastère du Wat po, dans l’ivresse du décalage horaire. Le jaune de ton écharpe ouvrait à l’abandon, à l’Inconnu.

Tu te tenais raide et convenu, presque ringard. L’écharpe jaune te décalait, te donnait l’odeur, l’insolite du voyage.

Je regardais ton écharpe, ma pensée flottait. Etait-ce le jaune solaire de Van Gogh, celui plus sale, moins lumineux de Soutine ? Je ne trouvais pas d’autre contact avec toi que ce jaune d’une écharpe de laine par un début de printemps.

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