Cimetière de Montmartre. Les rendez-vous d’Armand Bonnefont



Poésie | Martine Estrade | Literary Garden

La nouvelle suivante fait partie d’une série de nouvelles écrites dans des cimetières. Le cimetière confronte à la représentation idéalisée que l’être humain nourrit de lui même celle que, vivant il souhaiterait voir embaumer à sa disparition .Les cimetières montrent des édifices reflétant la construction idéalisée d’une vie. La nouvelle dans un cimetière constitue un meurtre de l’idéal au profit de l’humain, et des cycles de la vie et de la mort.
non publiée
illustration de Cécile Masson


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Armand Bonnefont se regarde dans la glace en pied de la porte de l’amoire, redresse le dos, bombe le torse. Il a belle allure, mince et élancé, droit comme un i , il pourrait encore séduire. Il était beau garçon lorsqu’il était jeune, Toutes les filles le regardaient. Si seulement il avait été moins timide !

Le réveil a sonné à 7 heures.

Il se rase de près et se parfume d’eau de Cologne à la lavande. Il lisse sa fine moustache: il porte élégamment ses soixante-seize printemps. Comme chaque samedi matin, il s’est fait beau, pour son rendez-vous. Chemise de coton blanc amidonnée, complet de velours tabac et cravate assortie, il est vêtu de son costume des jours fastes. Il se l’est offert à sa retraite. Pour changer .Il n’en avait pas acheté depuis des années. Le prix lui est apparu monstrueusement cher. Il l’a quand même acquis. Depuis, il le met chaque samedi et dans les grandes occasions.

Par la fenêtre de sa chambre, Armand contemple la rue Tholozé qui grimpe escarpée. Les ailes du Moulin de la Galette, comme toujours, sont impassibles. La rue est déserte. En dessous de chez lui, la poissonnerie Pepone n’est pas encore ouverte. Il fait beau. Hier il s’est acheté un plat de tomates farcies, un morceau de Brie, une barquette de garriguettes et une miche de pain. Il a fait cuire son riz. Sa matinée est libre. Il ne rentrera que pour le déjeuner.

Depuis seize ans, Armand habite seul, une petite pièce encombrée, au plancher usé et aux murs ocres patinés chargés de livres. .Auparavant, il demeurait un peu plus loin. Lors de sa retraite, il a eu envie de changer de vie. Il fallait remplacer le boulot par quelque chose. Il est venu ici. Comme il avait des économies, - il n’avait jamais été dépensier-, il a acheté ce petit deux pièces.Montmartrois. Autour, il y a tous les commerces, rue Lepic et rue des Abbesses.

Il descend prendre un café noir au bar d’en face. Albert, le patron, lui prépare son expresso, Il lui tend la corbeille de croissants et s’affaire en silence au nettoyage des verres ou du comptoir. Fanny, sa fille adolescente, travaille au bar le samedi. Elle salue Bonnefont avec un sourire enjôleur. « Comme vous êtes beau ,Armand !» Armand, comme à chaque fois, rougit .

Le lendemain, Armand Bonnefont reviendra, Albert et lui parleront de la pluie et du beau temps, des commerces du quartier qui changent. Ils commenteront la nouvelle coiffure du yorkshire de madame Graindorge, une concierge volumineuse et volubile. Dès qu’elle voit Armand, elle le rejoint fièrement au comptoir avec « Bikini, de Graindorge »son chien adoré. Mais aujourd’hui, Armand n’est pas disposé à parler. Comme chaque samedi depuis qu’Albert connaît Armand, c’est à dire depuis qu’Armand Bonnefont habite rue des abbesses. Auparavant, Armand n’avait qu’un jour de repos , le dimanche. Il lisait le journal. France soir, pour les photos. Il lisait tout. Jusqu’aux annonces et aux publicités. Ca lui prenait parfois trois heures.

La promenade du samedi, c’est depuis la retraite, et le déménagement près du cimetière de Montmartre. Autrefois, de temps à autre, Armand allait au musée. Voir le portrait de Madame Récamier. Il n’y a pas longtemps, il a rêvé d’elle. Elle était nue devant lui sur son sofa, il s’est réveillé en sueurs.

Le cinéma, il n’y allait pas. Mais il écoutait à la radio. les voix des femmes. .Il les différenciait comme un berger, le chant des oiseaux. Il se plaisait à considérer qu’elles s’adressaient à lui.

Le café bu, Armand Bonnefont s’engage d’un pas régulier dans la rue Joseph de Maistre. Sur le pont de la rue Caulaincourt, les rembardes de métal surplombent et traversent de chaque côté le cimetière de Montmartre. Armand apprécie que les piétons traversent le cimetière en allant à leur travail. C’est bon pour tout le monde, pour les vivants et pour les morts.

Une vallée de tombes descend à droite du pont, tandis qu’à gauche, les sépultures des terrasses surélevées dominent le pont de leurs croix de pierre. Une allée de pavés noirs serpente cernée d’un mur envahi de lierre. Les sépultures anciennes, anarchiques, créent un labyrinthe où surgissent de rares allées ordonnées et alignées. Depuis le pont, on voit la tombe de la chanteuse Dalida. Une sculpture en pied de l’artiste se détache devant une stèle de marbre noir gravé d’un astre solaire doré irradiant. Devant la tombe sont disposés d’énormes bouquets de marguerites blanches et jaunes et des buis taillés en boule serrés les uns contre les autres. Dès que le cimetière est ouvert, les visiteurs se succèdent et se confient à elle. Eulalie aussi chantait dans les bars de la rue Fontaine, de l’autre côté du boulevard. Armand sortait chaque samedi soir y boire un verre, dans les années après la guerre.

Armand Bonnefont regarde le parterre jaune blanc et le marbre de la diva. Il la trouve belle, fragile, comme le sont toutes les femmes. Il songe à Eulalie, venue si jeune à Paris. Elle ne voulait pas être employée de ferme. Armand lui offrait des bouquets de fleurs. Eulalie adorait les marguerites « les blanches, -je t’ai déjà dit, pas les jaunes- , le luxe c’est la simplicité !». Depuis, Armand Bonnefont n’achète les marguerites que blanches, il les regarde avec intérêt dans les prés ou les jardins. Il ne les confond plus avec les pâquerettes. Il ne sait pas où est la tombe d’Eulalie, quelque part dans un cimetière de campagne. Sans aucun doute, il doit y avoir des marguerites. Il y en a toujours dans les cimetières. C’est Eulalie qui le lui avait fait remarquer. Un jour, Eulalie en a eu assez de sa vie agitée dans les bars et les théâtres de Montmartre. Elle est repartie on ne sait où, sans rien dire. Sous Armand, célibataire endurci, le sol s’est effondré.

Quand il y pense, il regrette de ne pas lui avoir proposé de l’épouser. Il allait la voir chaque week-end, chaque fois qu’elle chantait. Il n’osait pas se déclarer. Il attendait. Il l’invitait dès qu’elle était libre au restaurant, le dimanche. Il la regardait ébloui. Il avait vingt-cinq ans, il était jeune employé comptable à la SNCF. Il lui a même fait découvrir la mer qu’elle n’avait jamais vue. Un dimanche, ils sont allés ensemble au Tréport en train. . Il la revoit sur les galets, ôter ses chaussures, tremper le pied dans l’eau et s’enfuir en riant. Le rire d’Eulalie, couvrait même le bruit des vagues. Ils ont commandé un plateau de fruits de mer, au restaurant. Eulalie n’arrivait pas à manger les pattes de l’araignée. Ils sont allés se promener sur la falaise. Elle a glissé sa main dans celle d’Armand, elle l’a serrée très fort. Armand a rougi, son cœur battait trop vite, il n’a pas osé répondre. Il a eu peur d’être inconvenant. C’est peu de temps après cette journée qu’Eulalie est partie. Tous l

es bruits ont couru. On a même dit qu’elle était partie avec un planteur américain.

Armand descend l’escalier de pierre en se tenant à la rampe de métal centrale jusqu’au portail vert du 2O avenue Rachel. Il est 8h35, les portes s’ouvrent, un chat blanc s’approche de lui et se frotte à sa jambe.

Armand Bonnefont commence sa promenade. Sur le côté gauche de l’entrée par un escalier à double niveau, il gagne la première division, l’allée des Polonais. Il va voir les chats. Dans cette partie un peu excentrée, à l’arrière des sculptures monumentales, ils ont envahi les vieilles tombes. Ils profitent des ouvertures dans les portes délabrées par la rouille pour en faire des abris.. Plus tard, quand les visiteurs sont nombreux, ils se cachent. Armand a vécu son enfance entouré de chats. Seul, il s’ennuyait un peu, il jouait avec les chats. Bambi, un énorme gouttière au caractère doux que sa mère allaitait alors qu’il était adulte et énorme dormait avec lui.

Armand Bonnefont n’a pas de chat, ça serait trop de complications, il se contente de ceux du cimetière qui n’ont pas peur de lui.

En haut de la terrasse, la statue en bronze d’une femme assise se tourne vers le ciel, les yeux mi-clos, elle s’appelle « la douleur » c’est la préférée d’Armand. Une jolie femme. Il reste parfois une heure devant elle, nostalgique. Près d’elle, un arbre a poussé au milieu d’une pierre tombale. Le tronc énorme la sépare en deux. La force de la vie est décuplée en ce lieu. Un peu plus loin le gisant d’Alexandre Dumas repose, raide, sur ses lauriers.

Sur les vieilles tombes, délabrées, fleurissent les couronnes désuètes en céramique : roses, pensées, marguerites ou violettes. Les roses rouges font surgir les souvenirs d’amours et de théâtre. Armand revoit le velours pourpre des sièges des Bouffes du nord, les rideaux cramoisis des représentations.

Le père d’Armand aimait les femmes, Elégant et drôle, on l’avait surnommé « le matou ». A cause de ses conquêtes féminines et de ses chats. Les femmes venaient avec plaisir à l’épicerie. Le père Bonnefont, conteur et rêveur, récitait des histoires. Armand admirait son père mais, lorsqu’il observait l’expression de sa mère, -les traces de la jalousie sur le front, exactement comme un oméga -, il s’inquiétait. Madame Bonnefont devait faire bonne figure et se satisfaire d’avoir des clientes. Armand sentait qu’il y avait dans l’amabilité de sa mère quelque chose de compliqué. Il préférait éviter.

Armand lit les prénoms des femmes sur le chemin qu’il emprunte, toujours le même. Avec chacune, il a une histoire. Ce sont ses femmes.

Marguerite Langlois git dans une sépulture à la porte rouillée ouvragée. Marguerite, vêtue d’une robe blanche et de chaussures à talon plat aurait voulu se promener sur les chemins et cueillir des cerises à Montmorency, Bonnefont aurait du grimper aux arbres, sur les plus hautes branches pour la séduire. Un passe-temps dangereux. Il aurait risquer de chuter sous les yeux des oiseaux moqueurs

Sophie-Elisa Barbet, dans un caveau familial monumental, entourée d’iris et d’hortensias, ,aurait brûlé de passion pour les livres. Armand lui aurait offert des histoires romanesques. Il l’aurait emmené au théâtre ou voire des tragédies, Phèdre, par exemple. Elle aurait sûrement apprécié. Lui aurait été plus modéré. Phèdre c’est un peu trop.

Bertille Dupuis-Morin voisine avec tous les descendants des Dupuis et tous ceux des Morin, recouverte d’une couronne de violettes, empoussiérée de terre et de pluie. Elle aurait fait de la dentelle à la fenêtre d’un manoir de campagne, Il se serait bien entendu avec une contemplative, Peut être parfois même se seraient ils allés jusqu’à s’ennuyer ensemble. Le comble de l’intimité. Qui sait avec Bertille, ça aurait peut être été une longue histoire.

Elisabeth- Eulalie Schoelcher repose sous une tombe abandonnée. La pierre, la stèle et le berceau de pierre sont enlacés par un lierre vigoureux. Elisabeth-Eulalie devait être une jardinière enragée, le lierre s’est vengé. Armand Bonnefont a souvent pensé s’acheter une petite maison à la campagne, pas loin de Paris. Elisabeth Eulalie se serait occupée du jardin. Peut être qu’il serait allé à la pêche. Elle aurait protesté : les femmes n’aiment pas préparer le poisson. Il aurait du donner son butin au chats. Ca l’aurait découragé.

Hermance Malaverneau repose sous une statue de gisante en bronze. Professeur de piano, elle aurait joué des soirées entières, surtout l’été. Armand aurait adoré l’écouter. Mais on ne sait jamais avec les musiciennes, est-ce qu’elle aurait pas pu parfois lui préférer son instrument ? il en aurait été irrité.

Jeanne-Marie Lacroix, l’institutrice, aurait voulu de nombreux d’enfants, Armand se dit qu’il aurait été réticent .A tout prendre les chats sont plus tranquilles, l’idée de procréer l’aurait inquiété, Toutes ces responsabilités !

Avec Mélanie Leprince-Ladurée la pensionnaire du « Couvent des Oiseaux »au tombeau recouvert de jardinières et de couronnes de pierre, il se serait promené avenue Junot le dimanche, sous les tilleuls. Ca aurait été joli de la voir marcher avec sa taille fine, sa robe à fleurs et son joli chapeau.

Adélaïde Chemouilly aurait eu un chignon. Il aurait fallu faire attention, ne pas se piquer.

Marcelle-Zoé Cau , l’humoriste, aurait fait des jeux de mots. Armand n’a jamais été rapide, il n’aurait pas compris. Il se serait senti sinistre, ou qui sait, pire, bête. Autant renoncer.

Avec Louise-Ernestine François, une pétroleuse : ils n’auraient jamais été d’accord. Surtout pour les spectacles. C’est elle qui aurait changé à son contact…

Il y en a d’autres. Et d’autres encore !

Armand rêve à ses femmes, leur invente une vie, des anecdotes, les rencontre, imagine comment il les aurait aimées.

Armand Bonnefont a faim. Il est près d’une heure de l’après midi. Il approche du but ultime, de son rendez vous, la « dame aux camélias ». Il gagne le chemin Saint- Eloi et la tombe de Alphonsine Plessis. Lorsqu’il croise une pierre tombale sur laquelle s’inscrit « FAMILLE = DANGER » il se détourne, il est réticent vis à vis des slogans politiques.

Il est arrivé. Il marque un temps d’arrêt, rajuste sa cravate, c’est le moment fort de la semaine.

Alphonsine Plessis est morte à 23 ans. La phtisie a mis fin à sa vie de courtisane. Quel gachis ! Bonnefont s’économise. Il ne se laisserait pas consumer par la vie. Il songe encore à Eulalie. Il respire plus vite. Lui aurait tiré Alphonsine de sa vie de débauche ! Il l’aurait épousée .Par amour pour lui, elle aurait reçu ses soins. Elle aurait guéri de sa phtisie galopante. Elle aurait retrouvé le goût d’une vie saine. Des tisanes, une alimentation frugale et régulière, des promenades à pied, la fidélité d’un foyer, le bonheur conjugal. S’il avait été là, tout cela ne serait jamais arrivé !

Dans la vasque, fleurit un rosier rouge .Devant le tombeau, un camélia s’épanouit dans un pot. Il offre au soleil des feuilles d’un vert tendre, un vert naissant, Armand sort la petite bouteille d’eau qu’il a emporté dans sa poche. Comme chaque samedi depuis la mort d’Eulalie, il s’apprête à arroser le camélia de sa Marguerite.

Soudain, il s’interrompt stupéfait, le souffle coupé. Son sang ne fait qu’un tour. Sur le tronc du camélia, quelqu’un a coupé au sécateur les deux branches abimées de l’arbuste. Les tranches de section sont fraîches, la terre est humide. Le cœur d’Armand s’emballe, il bat tantôt trop vite, tantôt trop lent, hérétique et rebelle.

Saisi par le vertige trivial de la jalousie, Armand ne sait plus, à ce moment, s’il est mort…Ou s’il est vivant.

Lorsqu’il se ressaisit, Armand Bonnefont est en proie à la colère et à la curiosité ; Il n’a plus faim. Il ne rentrera pas déjeuner. Il va s’installer quelques mètres plus loin, près de Louis Jouvet et il saura qui s’octroie des droits sur Alphonsine.

Comme un tigre aux aguets, il observe. Pendant longtemps, il n’y a personne. Et puis un jeune homme emprunte le chemin Saint Eloi, s’approche du tombeau. Quoi, ce blanc-bec à l’allure mièvre ! Il ne s’est même pas habillé correctement pour lui rendre visite. Est ce qu’il croit qu’un étudiant désargenté soit de quelque utilité à Alphonsine. Quelle candeur ! Sous l’œil brillant de rage d’Armand, le jeune homme en jean dépasse innocemment la tombe et gagne l’allée supérieure ; Armand respire profondémént.

Beaucoup plus tard, un homme d’une cinquantaine d’années s’approche. Qu’est ce qu’alphonsine pourrait bien faire avec ce vieux cadre arrogant. Encore un, attiré par la jeunesse, qui abuserait d’elle et la jetterait. Certainement un homme marié, qui veut pimenter son foyer conjugal d’une aventure avec une artiste. Un goujat ! Un enfant blond de cinq ou six ans rejoint l’homme près de la tombe. Il veut partir, il n’a pas le droit de mettre les rollers dans le cimetière. Il n’est pas content. Papa lui avait dit qu’il pourrait visiter le cimetière avec alors que ça n’est pas vrai. Le père sort le plan de la promenade de la mairie de Paris. Elle est presque achevée. Il cède et accompagne l’enfant vers la sortie.

Une femme s’approche, discrète et fine. Elle se dirige droit vers la tombe. Armand éberlué sort de derrière son arbuste. Une femme ! Alphonsine avec une femme, quelle duplicité ! Bonnefont ne peut pas croire à une telle chose. L’inconnue observe la tombe, La mimique traduit qu’elle la découvre. Encore une touriste.

Quelle idée a eu la mairie d’envoyer tous les visiteurs sur la tombe d’Alphonsine ! Est-ce qu’ils ne peuvent pas imaginer qu’avec sa vie, elle ait besoin de tranquillité ? Bonnefont ronchonne. Il reste tard, jusqu’à la fermeture.

Il y a d’autres hommes. Des jeunes, immatures et pas finis, inconsistants, insécurisants. Des vieux, libidineux et sans doute rabat-joie et geignards, auto-compatissants. Des ni jeunes –ni vieux, pervers, manipulateurs, irresponsables. Pauvre Alphonsine ! Heureusement, Armand les récuse un à un .Qui sait quelle allure a l’homme au sécateur ? Il se promet de revenir le lendemain, et le surlendemain s’il le faut. Il se prépare à la guerre. Il guettera jusqu’à trouver l’intrus, le rival, le persécuteur d’Alphonsine, le trouble fête de leur rendez-vous.

Lorsqu’il parvient à la porte du cimetière, il croise le gardien responsable de la division du chemin saint Eloi. L’autre le connaît bien et accueille amusé, le vieil original qui vient chaque samedi voir Alphonsine. « Vous avez vu Armand ? la mairie a pris un jardinier pour entretenir les tombes de la promenade touristique. La tombe d’Alphonsine est sur le guide ; Hier, il a nettoyé son camélia, vous devez être content ! »

Armand Bonnefont est sidéré. Transformer la tombe d’Alphonsine en étape ! Faire d’Alphonsine une fille publique, et ce, des années après la fermeture des maisons closes ! Quelle moralité dépravée ! Quelle époque ! Oser toucher au camelia !

D’une humeur de poseur de bombe, Bonnefont sort du cimetière. Ce soir non plus, il ne mangera pas.

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